En écoutant distraitement la radio l’autre jour, une info
discrète et surprenante m’est tombée dessus. Directement issu de la caboche
fulminante des chercheurs américains, une récente trouvaille permettrait à la
police de Los Angeles de prévoir, de prédire même, les crimes qui s’apprêteraient
à être commis :
Predictive Policing. Rien que ça.
Et là, le premier truc qu’on se dit c’est : « Waaa,
exactement comme dans Minority Report ! ». On s’imagine déjà les
trois mutants précogs se trémoussant dans une baignoire, à l’affut du prochain
meurtre. L’équipe d’intervention qui réagit au quart de tour pour empêcher le
criminel de commettre l’acte odieux et… Non, en réalité on est quand même loin
du chef d’œuvre de Philip K. Dick.
Exit les précogs
Tout d’abord, la découverte en question n’en est pas tout à
fait une,
puisque le programme existe déjà depuis 2011, où il a été testé enpremier lieu dans la ville de Santa Cruz. A l’époque, il s’agissait de traquer
les voleurs et les cambrioleurs, avant qu’ils ne passent à l’action. Pour cela,
pas de mutants drogués jusqu’à la moelle mais un programme informatique
complexe, qui s’appuient sur les délits commis ces dix dernières années pour
prévoir le comportement de leurs auteurs. La logique veut vraisemblablement que
les criminels aient un train-train quotidien et qu’il leur manque une sacrée
dose d’originalité, puisque lorsqu’un crime est commis dans un secteur, d’autres
suivent automatiquement. Donc, pas de précogs. Dommage.
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C'est la crise... |
Manque de main d’œuvre
Pas de mutants, et pas de super-flics non plus d’ailleurs. Predpol
a avant tout été crée dans le but de restreindre le champ d’action de la police
américaine, pour une approche plus efficace. Non pas qu’ils soient
flemmards ou mal entraînés, mais les effectifs diminuent d’années en années,
alors que le crime attire toujours autant les vocations, à tout âge. Le
programme est donc la pour s’assurer qu’il y ait toujours du monde là où les
meurtres, vols et autres méfaits se préparent. Une manière de concentrer l’action
avec la précision d’un laser, et qui s'exporte. Mais sans Tom Cruise.
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Tant pis pour Minority Report alors ? On retrouve tout
de même quelques points communs avec la nouvelle de Dick (ou le film de
Spielberg, pour ceux qui n’aiment pas lire).
Des questions d’éthique peuvent vite se poser sur cette
manière de chasser les vilains. On s’imagine que les forces de l’ordre
attendent le flagrant délit pour agir, mais pour les plus impatients d’entre
eux, les choses risquent vite de passer du côté de l’arrestation arbitraire.
Plus moyen de sortir tranquillement dans le quartier s’il a été récemment fiché
comme « coin à risques ». De plus, l’algorithme se base sur la
répétition des crimes, leur localisation et le moment où ils se produisent le
plus souvent. Les criminels criminels devraient vite faire avec ces critères,
et les choses reprendraient alors leur cours normal. Les chiffres encourageants
du style « -33% d’agressions » ne se basent que sur un an d’expérimentation.
Sans compter la faculté d’adaptation des avocats (d’ailleurs, j’en ai pas vu
dans le film…).
Enfin, Predpol n’est avant toute chose qu’un programme. Et
un programme, ça se cracke. La police et les concepteurs ont beau assurer l’étanchéité
du système, déjà réputé inviolable, ils disaient la même chose des bases de
données de la NSA, du FBI ou encore de la NASA. Et des infos qui permettent de
commettre des crimes en toute impunité se monnayent cher.